☺ [ciné 1985] Et je vis paraître un cheval pâle...
... dont le cavalier s'appelait Mort.
Apocalypse. St Jean.
Ainsi débute
♦ Pale Rider. ♦
Réalisé par Clint Eastwood et sorti en 1985.
♦ Titre français: Le cavalier solitaire. ♦
A première vue, il ne s'agit que d'une énième interprétation du thème très ancien du justicier surgi de nulle part sur son cheval blanc...
Et il y a de cela... Mais celui-là est tout à la fois "cela" et "un peu différent".
Jamais on n'a si bien exprimé la nature étrange de ce héros qui jaillit d'au-delà de l'horizon pour venir mettre bon ordre à tout ce qui ne va pas. Dans certains westerns, il intervient sur une perturbation extérieure à la communauté, dans d'autre sur une perturbation intérieure... Cet étranger, qui n'a pas toujours un nom, est le bras de la Providence.
Notons ici la particularité de ce cavalier: son cheval n'est pas blanc, mais pâle.
Dans certaines tradactions de l'Apocalypse, le cheval du 4° cavalier est dit "verdâtre". Cadavérique, en quelque sorte...
Dans ce western qui cite par "voix off" l'Apocalypse durant la phase de "prologue", il s'agit d'un cheval à la robe grise, peu unie. Une bête qui évoque un peu les brumes de la montagne dont le cavalier est descendu. D'où arrivait-il ? On ne le saura pas. Tout comme on ne saura pas comment il a survécu aux sept balles qui semblent l'avoir percé de part en part. Tout comme on ne saura pas en quelles circonstances il s'était battu une première fois contre le chasseur de primes et ses assistants. Cet homme ressemble à un fantôme. On lui devine des lambeaux de passé, mais sans parvenir à rien savoir de lui. Il paraît n'être venu là que pour exaucer la prière de la jeune Mélanie, et pourtant quelque chose le lie d'une part à la mère de celle-ci, d'autre part au chasseur de primes.
Le titre français est (désolée pour le jeu de mots presque involontaire) pâlichon.
Il n'est pas vraiment faux, mais il est insuffisant. Il ne rend pas l'aspect inquiétant de cet homme qui incarne la Mort.
Qui, peut-être, est lui-même un mort ? Peut-être... Ce ne serait pas la première fois qu'un "cavalier justicier" est abouché à l'au-delà, dans l'univers Eastwoodien.
Je pense ici à "l'Homme des Hautes Plaines" (1973), où les dernières répliques m'ont toujours fait un effet de "remanié". Quand le nain demande quel nom il doit écrire sur la tombe et que la réponse est "le mien"... est-ce que la phrase "c'était mon frère", qui vient après, était prévue au départ ? Sachant qu'au début du film, le cavalier mystérieux a commencé par acheter une selle et des bottes neuves ?
Dans Saint Jean (et pas que chez lui), la Mort ne relève pas du Bien ou du Mal. Le 4° cavalier est comme les trois autres un fléau lâché sur le monde, mais c'est aussi le sort commun de toutes les créatures vivantes. La justice divine intervient après.
La justice de la Providence n'est pas forcément immanente. Dans un western, il y a même de grandes chances qu'elle ne le soit pas.
Le "cavalier pâle" joue ici un rôle de bras divin, d'archange, pourrait-on dire (ange armé, ou ange-guerrier si on préfère).
A noter qu'il rechigne à employer la violence.
Son premier contact avec ses futurs protégés se fait en intervenant bâton en main pour empêcher des brutes de rosser un chercheur d'or. Petite démonstration d'un style de combat plus courant dans les films d'art martiaux que dans les westerns. Il remet ça contre une brute format XXXL à qui il explique gentiment comment se soigner, une fois qu'il s'est blessé tout seul contre un rocher. Finira quand même par aller chercher son flingue à la banque... et déposer son col de pasteur dans le coffre à la place.
Quand y'a pas le choix, y'a pas le choix.
Sur ce même blog :
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