Extrait = Etranges étrangers
Tandis qu'il se restaurait, les clients de la cafétéria le dévisageaient avec curiosité et conversaient à voix basse, devinant un visiteur de rang peu ordinaire. Il entendit évoquer la nature superstitieuse des colons, leur servilité devant la noblesse spatiale, la foultitude de leurs inventions étranges et futiles, leur organisme dégénéré incapable de survivre sur la merveilleuse Planète-Mère et les explorations aux confins de l'univers, qu'ils se glorifiaient stupidement de mener à la recherche de traces vivantes, quand il aurait été bien plus utile de s'orienter vers les masses sidérales possédant des minerais utilisables.
L'Espace était peuplé de subhumains et pseudohumains qui n'auraient pu que souiller la planète. Ne les avait-on pas bannis depuis trois siècles ? Interdits à jamais de séjour sur le sol terrestre ? Celui-là était à l'évidence un de ces pseudohumains qui se targuaient d'être des demi-dieux, alors qu'ils étaient seulement des erreurs de la nature. Il n'était heureusement que de passage, ainsi que tous ses semblables présents sur l'astroport, mais pourquoi disposait-il d'une escorte de cinq primohumains ? Un seul aurait suffi !
Et blablabla et patati. Un bourdonnement horrible flottait au-dessus des tables, et Tahman maudissait ses oreilles d'être cinq fois plus performantes que celles d'un non-mutant. Honnissait son incapacité à employer au mieux son organisme supérieur. Il n'était qu'un gamin gâté et bon à rien, excepté jouer la comédie hiératique de la grandeur.
Les mots de ces gens résonnaient en lui comme une avalanche d'injures, mais sa mission ne l'autorisait pas à y prêter attention. Il acheva de se restaurer sans se départir de la gravité superbe exigée par le protocole. En quittant la cafétéria, il croisa l'équipage d'un cargo en partance. Malgré leurs uniformes ornés des emblèmes de la Confédération, il effectuèrent la courbette de haute humilité que l'on réservait aux gouverneurs-barons, aux Gardiens des Glyphes et aux Princes de Lumière. En l'état de solitude et d'angoisse où il se trouvait, il en fut réconforté. Comme lui, ces gens étaient des Spatiaux. Des enfants d'Espace Infini.
Le gouverneur-baron de GH112KR-Quercus fit retour à cette salutation profonde par un gracieux geste de la main, seule réponse que le protocole lui autorisait désormais. Il le trouvait puant de supériorité, mais n'avait pas le choix. À cette attitude hautaine, ils devinèrent qu'il n'était pas un simple ambassadeur et esquissèrent rapidement un signe propitiatoire. Il fit celui de l'accepter. Une femme, qui avait observé le blason sur le couvre-chef du baron, ajouta le signe du spatiopeuple Quercus associé à celui de la grandeur. C'était un encouragement. Le signe d'appartenance au clan suivit, accompagné de celui des bâtards, puis d'offre des forces de l'âme, en une forme réservée aux personnes liées par le sang. Elle était fille d'un noble appartenant au clan Quercus et d'une femme du peuple, et de ce fait lui offrait pour sa mission sa propre énergie. Il répondit par une bénédiction. Devant cet échange muet entre Spatiaux, tous les sourcils de l'escorte froncèrent. Le guide se montra subitement très pressé de conduire son protégé à l'hôtel et la conversation n'alla pas plus loin.
Deux terrestres en uniformes ralentirent leur marche pour observer la profonde inclinaison des roturiers spatiaux devant un baron, et rirent bruyamment
Employé pour le 76° concours d'extraits du forum Jeunes Ecrivains.
(mai 2019) Thème "Discrimination".
Roman "Errances Galactiques".
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